Tristan Hennessy ▬ The wolf is at home

Quiconque vient au pouvoir ne peut escompter avoir les mains blanche… c’est un fondamental qui faut accepter si on souhaite devenir un jour un grand homme. – Tristan Hennessy.

Faire la paix avec les vampires n'a jamais été l'idée du siècle ni même de ceux à venir. Si faire la paix était peut-être l'un des rares moyens pour garantir un équilibre et préserver notre anonymat dans ce monde, les laisser continuer à vivre leur existence de parasite est tout bonnement insupportable. Laissons-nous les fous arpenter les ruelles de notre belle ville ? Non, nous les enfermons dans des asiles face à leur destin d'être incompris. Les vampires devraient subir le même sort avec la chance de leur offrir ce que leur être ne peut obtenir : la mort éternelle. Ils ne sont que des humains malades, malades de vivre avec cette peur de subir ce que chaque créature devrait connaitre : la mort. L'immortalité n'est pas une solution, elle n'est qu'un châtiment. Vivre trop longtemps ne donne jamais rien de bon, toutes les immortelles finissent par se lasser, s'ennuyer et sombrer dans la folie et le sang. Ces humains sont contraints de n'être que des sangsues, leur éternité les pousse à penser qu'ils sont légitimes à être supérieur aux autres et de dévorer la majorité peuplant ce monde. Comme si finalement être un simple humain sans capacité ne sert qu'à une chose : nourrir les humains qui ont mutés. Entre ceux qui leur suce le sang, leur bouffe le cœur et j'en passe, naître humain semble être une malédiction. Et pourtant… nous nous sommes mis d‘accord pour peupler leurs mythes et légendes et rester dans l'ombre. Dans l'ombre des « proies » pour mieux les dévorer dans le silence de la nuit ? Cela est tout aussi ridule et pourtant, nous affirmer au grand jour serait le début d'une nouvelle guerre. Personne n'aime, quand les montres sortent du placard, il vaut mieux leur filer un coup de fusil avant qu'ils n'envahissent toute la chambre. La ligue à peur de cela, d'être dévoilée, que nous sommes dévoilées, nous ne pouvons vivre dans un monde qui accepterai autant de différence, déjà que nous avons mis du temps avant d'accepter que les noirs ne soient pas des êtres inférieurs… alors des créatures comme nous ? Dans quel monde vivons-nous ? Les simples humains ne pourraient plus être en haut de cette pseudo chaîne alimentaire avec au-dessus leurs prédateurs favoris : les créatures surnaturelles, des humains aussi… un paradoxe d'être le roi, mais d'être menacé par sa propre espèce.

Personnellement je pense qu'on peut vivre dehors, mais avant cela il faudrait se battre. L'humain est voué à se détruire surtout entre eux. Et nous serons les nouveaux ennemis à abattre et nous sommes que trop peu pour faire une armée solide, trop peu de motiver à tuer autrement que pour son profil personnelle (ou satisfaire son besoin de sang). Nous ne sommes pas prêts à sortir dans l'état des choses. Alors, nous devrons rester caché aux plus grandes dames de ces imbéciles de Lupus Dei, aussi mal organisé que des terroristes de base. La prise de pouvoir se fait avec minutie et intelligence. Comme mon couronnement en tant que chef de meute.

Pour devenir alpha, il suffit d'être le petit malin égocentrique qui pensé tanner le derrière de l'alpha en place. Rien de plus facile, généralement, il suffit d'être un peu plus jeune et en forme. Un combat à mort devant des spectateurs ivres de sang et hop, le titre d'alpha vous ouvre les pattes ! En gros, être fort est un avantage avant même d'avoir une cervelle remplie. C'est pour cela que depuis des siècles notre espèce n'a jamais été vue comme étant des êtres civilisés mais, plutôt des bêtes sauvages. Déjà que ce transformé les nuits de pleine lune avec un faible contrôle sur notre bestialité aidait grandement… mais l'apologie de la bêtise était quand même la plus belle des inventions pour qu'on soit décrite à jamais comme des animaux. Harland Lamworth, était justement l'un de ses petits futés pleins de testostérone qui trouva légitime de devenir alpha, trouvant surement que son supérieur avait un peu trop de poil au menton. Être un vieux loup alpha, n'est jamais bon, surtout dans un rapport physique. Et pourtant… ça fait vingt ans que j'ai pris sa place.

Il manquait beaucoup de qualité à Harland, en plus d'un cerveau plein … il ne voyait jamais à long terme. Il s'entraînait pour rester au top et repousser les jeunes lords aux dents longues, mais ne cherchait pas à contrôler les appétits de pouvoirs des jeunes hommes qui le défiaient (puisqu'apparemment, les louves désirant le vaincre, étaient ignorées) …c'est pour cela que j'ai trouvé encore plus beau que ça soit sa propre Lupa qui entraînerait sa chute. Je n'ai jamais compris pourquoi les alphas mâles s'entichaient de prendre une jolie jeune femme, n'ayant que pour seule qualité sa beauté. Certes, se pavaner à son bras avec un bel accessoire était toujours plaisant, mais comme tout objet il revient toujours à sa juste place : dans le tiroir et on n'en fait rien d‘autre que de le montrer à ses copains pour venter un ego un peu trop gonflé. Autant que ce dit objet servent à autre chose que d'assortir parfaitement une tenue bien mal taillée. Mais cela est un autre débat.

Lady Nancy était en effet la plus belle des lupa que j'ai vu dans ma vie, distinguée, avec un peu de sang bleu dans les veines, bien éduqué et en bonne santé, elle ravisait chaque jour son compagnon par son physique irréprochable (jusqu'au jour où elle prendrait des rides). Elle avait été mordue par ses soins et revendiquée rapidement pour l'introniser à son bras dans un mariage qui comme souvent était forcé. Cela n'avait pas l'air de la déranger, préparer toute jeune à ne pas vivre avec son coup de cœur, elle était néanmoins tombée amoureuse de son ravisseur, développant un sacré syndrome de Stockholm. Peut-être, c'était-elle imaginée l'héroïne de l'un de ses romans à l'eau de rose, celui d'une jeune fille bourgeoise qui finit par s'éprendre du mauvais garçon de la ruelle d'en face ? Et dans ce cas, du joli loup ? Finalement, ce fut peut-être plus une pulsion zoophile qu'un syndrome… Peut-être bien. Mais son conte de fée n'était que dans sa tête et elle ne put jamais porter le fruit de leurs amours illusoire.

Pauvre enfant… croire que des gouttes chaque matin dans le café de son Jules allaient lui donner la vigueur nécessaire pour lui faire un enfant… pauvre enfant aussi naïve et pure qu'une jolie rose perlé de rosée. Elle ne fut qu'une piètre amante, j'aurais eu plus grande satisfaction avec mes propres ressources personnelles qu'en parcourant son corps d'albâtre. Mais il fallait au moins ce plaisir pour la mettre en confiance et la pousser à empoisonner son mari chaque matin. Un empoissonnement lent, très lent mais qui chaque matin affaiblissait son corps et son esprit… ponctué avec quelques rumeurs de complotistes gênants…et l'alpha sombrait dans la paranoïa. Il fallut ramasser le fruit mûr et son lieutenant était tout aussi gênant que lui pour ma prise de pouvoir. Je ne me voyais pas déclencher un combat d'égal à égal, je n'avais pas le temps pour ça, ni l'envie de finir blessée… et cela ouvrait la porte à d'autres ingénues, qui attaqueraient le nouvel alpha éclopé pour prendre le pouvoir. Cela avait déjà été fait et je ne les blâmerais pas de tenter la chance avec une personne avec moins de vitalité. Et ce lieutenant était typiquement le genre d'opportunistes qui auraient cette idée. Il était malin lui.

Ainsi, une jolie lettre parfumé écrite de la main de Nancy (m'étant destiné) arriva dans le club de ce lieutenant. Nancy avait pour habitude de me surnommer « MerryLove », ne comprenant jamais pourquoi j'aimais qu'elle me nomme par un dérivé de « Merrill »… elle avait fini par penser que mon côté excentrique prenait le pas dans nos jeux amoureux, sans jamais faire le rapprochement entre le prénom du lieutenant de sa propre meute et mon sobriquet. Sortir avec une douce idiote épargnait de nombreuses migraines…Merrill trouva flatteur que la Lupa s'intéresse à lui, y voyant surement l'occasion de se servir d'elle pour atteindre son alpha qui déjà traînait de la patte. Quelques rendez-vous galants plus tard, ils étaient tous deux murent pour être dénoncés par ces mêmes et délicieux petits oiseaux que sont les rumeurs…Harland les surpris (grandement aidé) et sous sa rage les tua tous les deux en pleine journée… il eut deux témoins humains… qui passèrent aussi au menu du soir. La ligue fut avertie et étant un membre de celle-ci je me proposai pour éliminer le loup garou fou. Quelle bonté d'âme n'est-ce pas ? Cela fut aisé et j'avais gagné ainsi ma première place au pouvoir. Nancy ? Oh Nancy, oui elle m'aimait, elle aurait fait n'importe quoi pour mes beaux yeux couleurs acier. Finalement, la belle broche qu'elle était, avait fini par être autre chose qu'un accessoire qu'on laisse dans son tiroir en attendant un bal.

Mes vingt années furent consacrées à solidifier ma meute, à la rendre stable et surtout à rester en haut sans jamais qu'un loup un peu trop présomptueux viennent me défier. Certes, cela arrivait régulièrement au début, mais comme de part hasard, ils leur arrivaient quelques choses et pour ceux qui n'avaient pas de tragique conséquence… finissaient au cimetière. Il fallait bien que je reste quand même puissant et que j'accepte de me battre pour asseoir ces vieilles traditions stupides. Quand on devient un monarque, il faut savoir bien s'entourer et surtout que ceux qui sont à vos côtés soient parfaitement convaincus de votre légitimité et qu'il fasse deux mêmes l'oppression nécessaire pour qu'on vous foute la paix. Je ne voulais pas être l'alpha tyrannique, non il faut savoir doser cette peur qu'on insuffle pour le respect des lois et à la fois la doser pour que vos subalternes aient l'impression d'être libre. Être libre dans un pays gouverné par la monarchie... amusant non ? Un brin d‘innovation, la démocratie comme disent les Français. Une belle invention, pour justifier un nouveau pouvoir, qui revient au même qu'avant, mais sans couronne.

Hum que dire d'autre ? Ah oui, un alpha sans Lupa est souvent signe d'instabilité, croire que fonder une famille était la vertu suprême dans notre monde pour accessoire votre légitimité. Il me manquait une compagne…et je ne rien vous apprendre, si je vous informe que l'amour n'est pas quelque chose à laquelle je crois. Cela ne m'intéressait pas de choisir une louve pour qu'elle soit ma belle plante verte qui trône dans le salon, en ne rigolant pas trop fort tout en étant souriante, bien élevée pour lever le petit doigt quand le thé arrivait et qui bien entendu serait une belle poule pondeuse pour une myriade de petit loup ! Non, je désirai une compagne, une louve forte qui puisse se faire respecter par son simple charisme et son intelligence. Cela était peut-être dangereux de désirer quelqu'un avec des neurones… mais que voulez-vous, quitte à vivre avec quelqu'un autant qu'elle soit un minimum intéressant. Quant au fait de l'aimer et même de s'aimer à deux cela n'était qu'un détail, les couples ne se marient pas pour cette valeur qui fait frémir les jeunes filles en fleurs, mais bien par intérêt. Si vous voulez aimer quelqu'un, faite en un amant ! C'est bien moins contraignant et décevant.

Aucune louve n'intéressait mon esprit lupin… cela était pénible. Puis par hasard en allant rendre visite à mon avocat Mister Larrabie, je croisai le regard d'une douce jeune fille blonde aux immenses yeux vert. Très jeune à mon goût elle était néanmoins celle qu'avait choisi mon âme lupine. Je me pris de la suivre de question mon ami sur cette femme qu'il hébergeait chez lui. Une gouvernante, voué à se préparer à sa future vie d'épouse et de mère… je regrettais ce manque d'ambition de cette femme. Mais il est tellement difficile aux femmes de notre époque d'être autre chose que des épouses… Alors, lui offrir le don de ne plus être une proie à sangsue allait lui faire dévier sa destinée si fade et sans avenir. Et puis en discutant avec Larrabie, elle avait un cerveau, peut-être un peu trop pour une aussi jeune femme. Tant mieux. Je n'attendis pas la pleine lune pour l'attaquer dans le jardin familial… bien trop pressée de la récupérer à la prochaine lune ronde et de la sortir de ce chemin sans avenir.

Elle était étendue nue, couverte d'un peu de sang sur le visage…Oui, elle était presque jolie dans sa puberté d'enfant… Elle avait fait une belle chasse néanmoins. Aucun humain mort, j'avais veillé à ce point. Il serait dommage qu'elle soit tuée par ligue alors qu'elle entre dans la vraie vie.

« Que…qui êtes-vous ? »
« Votre alpha. Maintenant venez, vous devez apprendre à vivre lady Cain. »

Je lui appris à vivre avec sa nouvelle condition de louve. Elle m’en voulait de l’avoir arraché à son « fabuleux » destin d’humaine sans intérêt. Comme dédommagement de sa morsure, je lui offris le mariage qu’elle désirait, une somptueuse union qui l’officialisait en tant que Lupa, renforçant l’esprit de meute chez les miens. Elle finit par me haïr quand elle me demandait « pourquoi elle ? ». L’ego humain pense que quelque chose aussi incroyable arrive pour une raison et c’est parce qu’ils sont exceptionnels. Il fallait lui ôter cette idée de la tête, alors je lui avouai que sa transformation n’était le fruit que de mon égoïsme, de mon envie d’avoir un nouveau jouet qui tienne la route. Justifions-nous le pourquoi nous choisissons cette assiette plutôt qu’une autre ? Non. Voilà ce qu’elle eut comme raison, elle n’aurait pas la vérité, mon besoin d’une lupa, l’amour qu’avait mon âme loup pour elle et le fait que je l’ai trouvé intéressante et digne… la seule fois où cela avait été le cas pour un être humain.
Bien entendu cela lui déplut. Qu’elle me déteste est le moindre mal, au moins cela lui donne de l’intérêt, il faut bien que sa jeunesse se passe et qu’elle gagne de la maturité. Et cette maturité passera quand elle aura fait le deuil de son ancienne vie et qu’elle aura agité ses neurones dans le bon sens pour comprendre les véritables raisons de pourquoi elle est à mon bras. En m’exécrant je lui donnais un moteur (ou un ennemi à combattre) pour se construire, pour s’affirmer, la haine à la bonne dose ne détruit pas, elle renforce. Et il fallait qu’elle soit forte pour encaisser sa nouvelle vie. Et puis au moins, elle ne sera jamais dans le tiroir et s’épanouira seule en tant que femme et non dans un carcan d’épouse modèle qui donne la patte et fait la belle sur demande.