(violence) De sang et d'os (Aylee)

En passant près du bar pour rejoindre sa loge, Adèle avait fait un geste au barman afin qu’il prépare sa boisson favorite et apporte un nouveau verre au liquide carmin pour la femme qui l’accompagnait.

“ Ne vous inquiétez pas, vos gains vous attendrons au guichet , nous prenons soin de nos clients..” dit-elle tout en écartant le rideau pour inviter Aylee à entrer dans la loge.

“ Dois-je en conclure que vous prévoyez de devenir membre de notre club ?” s’enquit Adèle après que sa cliente privilégiée ait émis le souhait de revenir parier.

Elle invita à la jeune femme, enfin jeune tout était relatif puisqu’elle était vampire et probablement bien plus agée que son jolie minois ne le laissait paraître. Et si Adèle avait gardé cette cliente sous son aile, ce n’était pas uniquement pour s’assurer qu’elle deviendrait une habituée des lieux, ni même dans l’espoir de développer des affaires avec Miss Lokys. Non, ce qui l’intéressait le plus était tout autre, cela concernait la nature même de la jeune femme.
“ Installez vous..” lui suggéra t’elle en indiquant le sofa d’un geste.

Le barman ne tarda pas à montrer le bout du nez et à déposer sur la table ronde les deux boissons, pour Adèle, ce serait un Bloody Mary.
“ Me permettrez vous un peu de curiosité à votre égard, Miss Stanhope ? Je me demandais quel était votre âge.”

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Ses petites attentions semblaient atteindre l’objectif escompté, la femme au teint d’albatre semblait séduite et tentée de revenir plus régulièrement en ce lieu. Adèle aimait lorsque l’hameçon se fichait dans la gorge du poisson qu’elle essayait de pêcher. Mais une vampire, probablement âgée, cela pouvait recracher l'appât même si cela devait lui arracher la trachée, Adèle choisit donc de continuer à prendre soin de sa cliente du jour, d’autant qu’un être de cette sorte la rendait curieuse et leurs conversations précédentes indiquait qu’elles partageaient quelques points communs tout à fait plaisant.
“ Vous  m’en voyez ravie. ” dit-elle avec un regard appréciateur sur le visage gracile de sa vis à vis.

Elle se permit alors un peu de curiosité, autant pour sa propre satisfaction que pour flatter l’invitée de cette alcôve carmin. Aylee proposa alors un jeu, voilà qui était intéressant mais le gain proposé ne satisfaisait pas la femme d’affaire qu’était Adèle.
“ La maison ne reprend pas les gains des vainqueurs et je n’ai nul besoin d’argent. Je ne doute pas que vous puissiez trouver quelque chose de plus... divertissant à me proposer. ” dit-elle en approchant son verre de ses lèvres pour en prélever quelques gorgées qui lui chauffèrent la gorge.

La brune ne pouvait s’en douter, mais elle n’avait pas qu’une simple organisatrice de combat face à elle mais une Comtesse dont le mari, bien qu’incapable de la satisfaire, savait au moins tenir les comptes du domaine et s’assurer que son épouse ne manqua jamais de rien.

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Le vampire qui se tenait devant elle était loin d’être stupide alors pourquoi avait elle tenter de l’appâter avec un gain aussi médiocre ? C’était presque insultant mais Adèle n’en prit pas ombrage plus que ça. Après tout, Aylee était venu évaluer son établissement et donc sa gérante... enfin l’une de ses gérantes et vu ses propos de tout à l’heure, il semblait que les activités proposées ce soir et l’accueil tout personnel que lui offrait la sorcière marquaient le coup, puisqu’elle songeait à prendre une carte de membre.

La seconde proposition de gain de la belle brune était bien plus intéressante. Leur petite discussion devant l’arène indiquait que cet art était connu de cette femme et probablement maîtrisé de longue date... longue à quel point, ce petit jeu de devinette devrait lui permettre d’en avoir une meilleure idée puisqu’elle ne voulait pas livrer cette information aussi facilement.

j’apprécie que vous vous souciez de la blancheur de mes mains. répondit-elle en exécutant un petit mouvement gracieux les mettant en valeur. Mais ce jeu est bien plus amusant lorsque l’on pratique soi même ne trouvez vous pas ?

La sorcière repris son verre pour prendre une petite gorgée de son cocktail avant de répondre enfin sur l’enjeu proposé. Trois techniques, pour deviner en trois essais à partir de trois indices... ce serait presque spirituel ! dit-elle en ponctuant d’un petit rire délicat. Cette proposition me convient, alors je vous écoute.

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Bien l’enjeu était placé et convenait aux deux parties. Adèle répondit au sourire carnassier de la vampire par un rictus plein de charme, le charme de la mort en personne mais de celle qui inflige avec poésie la souffrance jusqu’à ce que la victime réclame elle-même d’être libérée par toute la noirceur de son pouvoir.
« C’est pourtant un plaisir si agréable à partager » souligna t’elle les yeux plissés derrière son masque.

Adèle écouta attentivement les indices, le premier était assez vague, mais devait probablement les ramener à des époques pouvant aller de quelques siècles avant et après Jésus-Christ.
Quant à la langue, il y avait de nombreuses langues considérées comme mortes, le latin et le grec pour les plus connues mais aussi l’egyptien, le sumériens, le celtes ou les langues des barbares du nord par exemple. Et elle avait donc vu la chute d’un empire, quelques empires avaient aussi chuté dans l’histoire.

Le premier empire qui lui venait à l’esprit... le plus connu ma fois et qui était venu jusqu’en Angleterre.. pourquoi pas. On datait la chute de l’empire romain a 470 ans, si elle l’avait vu, elle devait être née avant cette date...
« Je tente mille cinq cents ans pour avoir vu la chute de l’empire gréco romain peut être ? »

Apparemment, elle était un peu plus âgée que ça. Elle tenta donc la chute de l’empire egyptien qui était plus ancien, mais si elle l’avait vu, elle devait être assez âgée pour s’en souvenir, elle tenta donc en se basant sur cette période.

« Deux mille ans peut-être pour être assez âgée pour voir la chute de l’empire egyptien ? »

Encore raté, mais elle se situait donc entre 1500 et 2000 ans... Elle ne rencontrait pas souvent de personnes aussi âgées, même Milady sa démone personnelle n’avait que trois chiffres! Adèle prit le temps de la réflexion avant de tenter une dernière réponse contenant une petite note d’humour. « Ne me dites pas que vous avez mille neuf cents ans ? Ma foi, ce serait cocasse et pourrait presque faire de vous une forme féminine de Jésus. »

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Au moins, cette vampire avait compris qu’elle ne s’adressait pas à une simple femme de la plèbe qui vociférait comme des idiots en agitant leurs billets de paris là en bas. C’était fou de voir comme les plus guindés des bourgeois et aristocrates se comportait comme les plus vulgaires des villageois pour peu qu’on leur agitait du sang et de la sauvagerie sous le nez. Oui, la plupart étaient décevant et parfois Adèle se demandait pourquoi Milady et elle s’échinaient à vouloir leur offrir un spectacle de qualité. La torture était un art, qui pour peu qu’il fut manier avec doigté pouvait receler autant de poésie que les poèmes de Baudelaire.
Il restait à espérer que cette femme soit de ces artistes et non une simple bouchère comme l’était souvent ceux de sa race. Mais bon, celle-ci avait une élégance et une forme de dignité qui lui laissait de l’espoir.

Vint donc le moment de la devinette, simplement guidée par les micro-indices que Aylee lui octroya entre chaque tentative. Sa dernière proposition ne fut hélas pas la bonne et marquait un écart d’un peu plus d’un siècle apparemment. Adèle n’en perdit pas ce sourire poli en hochant la tête, acceptant son échec pour ce qu’il était... une simple difficulté à trouver une aiguille dans une meule de foin.

Mais voilà qu’avec ce charmant sourire, elle lui proposait une alternative pour obtenir son lot.
Adèle sourit sous son masque de beau lapin blanc... La petite proie avait donc soulevé l’intérêt du prédateur au point que celui-ci outrepasse ses propres règles pour l’attraper.
Adèle aimait être une proie alléchante, enfin tant qu’on ne s’avisait pas de vouloir la manger. Le seul endroit où elle acceptait d’en être une, c’était entre les mains d’un amant, et encore... il fallait qu’il prouve qu’il était à sa hauteur. Elle n’allait pas jouer les soumises de seconde zone devant une limace l’obligeant à aller ramper dans les égouts pour ne pas le surpasser... non. Sinon, les rôles s’inversait et elle finissait pas jouer le prédateur et prenait son plaisir dans l’humiliation et la douleur. Car si elle était une proie qu’on baise, elle, elle ne baisait pas des proies.
Bref, la curiosité de Miss Stanhope pour sa personne était donc montée d’un cran et c’était appréciable, d’autant plus quand, comme Adèle, on avait un petit égo à ne pas négliger.

La femme au masque de lapin toisa donc sa vis à vis, laissant filer quelques secondes avec ce sourire énigmatique puis délia son bras pour prendre avec une lenteur calculée la petite clochette posée sur la table. Elle la fit tinter.
« Votre générosité m’honore. Et je serai bien médiocre dans mon art, si je refusais une occasion de continuer à apprendre. »

Dès que le barman écarta un pan du rideau, Adèle passa la commande pour la cliente privilégiée du soir. Elles pouvaient entendre au dehors les clameurs du public, c’était l’heure du dernier combat, un combat de dix gladiateurs hommes et femmes qui se terminerait en ballet orgiaque. Si les paris se lançaient sur le nombre de partenaire différent d’un combattant ou la durée de son coït avant qu’il ne soit plus bon à rien... Les paris de Adèle se portaient sur le public, a savoir si certains seraient tenté au point de rejoindre les combattants, se qui finiraient pas ne plus tenir et glisseraient une main dans leur pantalon ou s’isolaient dans un coin qu’ils croiraient discret pour forniquer avec leur femme, leur voisine ou leur voisin. C’était toujours drôle de voir comment envoyer aux oubliettes toutes les belles conventions civilisées... et celà en une seule soirée.

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